Chapitre 6


***

Tu es tout pour moi.

 

C’est par un bel après-midi d'automne que ma visite au studio de la radio eut lieu. j'allai pouvoir, enfin, voir comment se déroulait une émission, après l'avoir tant imaginé dans ma tête. La question que je m’étais toujours posée, c’était de savoir ce que faisait l'animateur pendant que le disque passait à l’antenne.

Après 25 kilomètres de routes de campagne, l’arrivée à “L’Écureuil” fut très chaleureuse avec la présentation de l’équipe. Surtout il me fut donné de voir Yves s’affairer devant sa « console » et ses disques. Il avait tout réuni pour que je passe un bon moment avec mes chansons préférées. Les trois heures s’écoulèrent comme dans un rêve et mon ami me promit que cette expérience se renouvellerait souvent.

Avec les premiers froids, il devint de plus en plus difficile à Yves de faire les trajets pour se rendre au studio sans moyens de locomotion adaptés. Alors il décida, le 14 novembre, de quitter cette radio de la plaine. Quand il vint me l’annoncer, il était souriant et il me dit:

“Ce n'aura été qu'une expérience de plus, chaque changement a son côté positif et son côté négatif, c’est comme ça qu’on s’enrichit et que l’on évite de refaire les mêmes erreurs!” Pendant ce temps, il s’était approché de mon transistor et, faisant naviguer l’aiguille des stations, il me dit:

“Demain, 8 heures, sois à l’écoute et tu auras une surprise. Je ne te dis rien de plus, je reviendrai à midi pour te donner plus de détails, je me rapproche de toi et des anciens auditeurs de R .C. V.

A l’heure dite, le lendemain, c’est avec émotion que j’entendis :

“Vous écoutez Radio-Lotus sur le point 1O2 de la F M, c’est Yves Roger qui sera votre compagnon jusqu’à midi et Claude François qui va m’aider à vous dire:

”Quand le matin...” Les quatre heures passèrent à la vitesse grand “V” et pour terminer, il conclut :

“Pour ceux et celles à qui la date du 15 novembre rappelle quelque chose, voici :”Le lundi au soleil....”Merci à vous toutes et à vous tous, bon après-midi et à demain, même heure !”

A 12 heures 3O mn, j’ouvris ma porte sur Yves content de sa première émission, en direct de Saint-Germain.
 En cinq minutes, je sus tout sur Radio-Lotus :

La disposition du studio avec dessins à l’appui, l’ambiance avec les membres de l’équipe et bien sûr, il eut le plaisir de se réentendre puisque j’avais enregistré toute la matinée. Il en fut de même tous les autres jours, jusqu’au 18 décembre, jour où je participai à un jeu organisé par la station. Yves était absent, mais il m’avait promis que si je gagnais la place pour assister au spectacle de son ami chanteur, il m’accompagnerait et qui sait?....peut-être cela me permettrait de porter une jolie robe!

Après plusieurs appels téléphoniques à son domicile, sans réponse, je me rendis seule à la salle des spectacles. La neige tombait en flocons serrés, j’avais froid dans mon corps et dans mon cœur. Assise dans le fauteuil de velours rouge, je regardais arriver les gens, ils étaient tous accompagnés. Ils riaient, ils avaient l’air heureux. Comme j’aurai voulu avoir mon ami à côté de moi pour commenter tous ce que je découvrais dans le monde féerique du théâtre!Quand la lumière s’éteint, personne ne vit les larmes qui coulaient sur mes joues. Malgré la beauté de la comédie musicale qui nous transportait dans la galaxie du futur, en période de Noël, j’avais le cœur bien triste de ne pas pouvoir partager ce moment exceptionnel avec lui. A l’entracte, j’eus le plaisir de voir Alain Faccio qui me reconnu grâce à la description que Yves lui avait faite de moi. Il était là, en face de moi, dans son habit argenté, presque irréel. Il comprit mon émotion quand il réalisa que son ami Yves n’avait pas pu m’accompagner. Avec une douceur extrême, il prit le temps de me parler, de me dire que je serai une des premières à recevoir son prochain 45 tours dont le titre fétiche était:

”Copain, copain”. Il me présenta à son frère: Jean-Luc, qui faisait des animations dans différentes salles de spectacles. Il me promit de me faire part de ses futurs projets. On scella ce moment magique par le verre de l’amitié avec sa troupe et surtout, Liliane, la charmante présidente de son fan-club. Jamais une orangeade avait été aussi douce à mon palais. Ce petit intermède me permit d’oublier pour un instant... L’absent!

Il me fallut huit jours d’attente pour savoir le motif de cette absence. Se sentant très malade, son papa l’avait fait appeler pour un dernier entretien avec son fils.

Yves demanda de passer la nuit près de lui, jamais ils ne s’étaient sentis aussi proche l’un de l’autre. Ce papa fatigué, usé par la maladie n’avait plus que ses yeux pour communiquer avec son fils. Mais dans ces cas-là, on se comprend autant qu’avec des paroles!Hélas, au petit matin, la mort fut la plus forte. Yves dit “Adieu” à son père par un froid jour d’hiver. Cette séparation lui fut d’autant plus pénible que notre ami eut l’impression que ce père réalisait, un peu trop tard, que tout ce temps perdu loin de son fils, ne pouvait plus se rattraper! Pour Yves, c’était une nouvelle plaie qui s’ouvrait, dont la cicatrice aura bien du mal à s’effacer! Une de plus!

Pour nous deux, un autre point commun s’ajoutait aux autres :

Nos deux papas reposaient, désormais dans le même village, dans le même cimetière: face à face!

Et dire que nous n’aurions pu jamais nous... connaître.

L’année 1982 se terminait bien tristement pour notre animateur, mais il voulut assurer la transition et rester toute la nuit avec les auditeurs du 1O2. Il n’avait personne qui l’attendait chez lui. C’est vrai que malgré cette amitié naissante entre nous, jamais je ne m’étais permis de lui demander ce qu’il faisait une fois qu’il avait passé la porte de mon appartement. Un jour, il me posa une question étrange :

“On est bien ensemble, on est d’accord sur tout ce qui concerne le monde de la radio; mais si un jour, pour une raison idiote, on se fâchait, qu’arriverait-il à nous deux? Hésiterais-tu entre:

Continuer à m’écouter ou fermerais-tu ton transistor? ”

Mon premier étonnement passé, le plus sérieusement du monde, je lui répondis :

“Si cela devait arriver, mon ami, oh, oui que je t’écouterais. Tu deviendrais le plus minable des animateurs. Tu serais incapable de prononcer deux mots sans bégayer pour annoncer une chanson, surtout parmi celles que nous aimons tous les deux ! De plus, moi, je serais bien déçue d’avoir donné mon amitié à une “voix”!

Il me regarda, me tapota la main et me dit :

“Alors, c’est à souhaiter que cela n’arrive jamais”!

On reprit vite les stylos pour finir de préparer le programme du lendemain. Il me dit avec son sourire qui n’appartient qu’à lui :

“Demain, rien que pour toi, la dernière chanson de mon programme sera: ”Ne me quitte pas!”

Il partit en me laissant un peu nostalgique. Les jours qui suivirent, je sentis comme une lassitude dans le comportement de mon ami: il n’avait plus le même entrain, sa voix était lasse. C’est à ce moment que je compris qu’il y avait bien deux Yves :

ROGER et RONGIER.

Assis en face de moi, un jour, il me demanda :

“Si tu avais une radio à toi, comment l’appellerais-tu ?

Sans hésiter, je lui répondis :

“Radio-Plus... Plus + comme plus+ de musique, plus+ de poésie et “un” Yves sur l’antenne 24h sur 24 !”

Il sourit en me disant :

“Prépare-moi un programme sur une semaine, avec un changement de style toutes les deux heures... à peu près!” Il ne me fallut pas longtemps pour remplir la grille de programme, à la plus grande joie de mon complice. Tout fut réuni pour que notre projet voie le jour. On devait le remettre le 11mars 1983. Hélas, notre rêve prit fin, car on nous refusa l’accès à un point de la FM pour cause de saturation! Yves continua sur Radio-Lotus; en plus, il organisait des galas avec des chanteurs régionaux ce qui me permettait de l’accompagner avec ma petite famille dans les soirées dansantes. C’est de cette façon que j’eus le plaisir, toutes les fois qu’il était invité d’entendre et de revoir Benoît Sanson. Il était devenu la “coqueluche” de la F.M. avec son “tube:”

La bagnole” et son côté romantique avec “Pourquoi?” J’étais fière de lui car j’avais déjà eut le plaisir de lui parler par l’intermédiaire d’une radio locale et comprenant mon attirance pour la chanson, spontanément, il s’était proposé de m’apporter lui-même son disque, à mon domicile. J’en avais été étonné, mais il m’avait avoué qu’il était de St Germain et qu’il se promenait dans les rues... Comme tout le monde. Sa première visite fut beaucoup d’émotions pour tous les deux :

Pour lui, car il ne pensait pas que lorsque il chantait, des personnes comme moi, l’écoutaient avec tant de ferveurs. Pour moi, car naïvement, j’étais aussi heureuse de le recevoir que si s’avait été Michel Sardou ou Hervé Vilard. Avec sa gentillesse il ne tarda pas à venir s’ajouter à notre duo d’amis! Là, j’étais comblée, car je pus assister à plusieurs galas où c’était Yves l’animateur qui présentait Benoît, le chanteur! Mon mari immortalisait ses moments en prenant des photos qui étaient ma fierté. Je faisais partager mon bonheur à toutes mes connaissances. Je m’aperçus trop tard, hélas, que parmi elles, il y avait des rivales. Je pense, en particulier, à Louise à qui j’avais donné toute ma sympathie, avait laquelle je partageais ma passion pour la radio.

En faite, elle ne cherchait qu’à séduire mes deux amis. Elle les attira chez elle car elle pouvait, sans scrupules, les manipuler comme des marionnettes. Il est sûr qu’il y avait des compléments d’affection qu’ils ne trouvaient pas chez moi. Du jour au lendemain, je vis s’éloigner mes deux idoles, allant chercher ailleurs... autre chose!

Mon beau rêve était en train de fondre comme neige au soleil. Pourquoi?

 

 

LA FILLE DE L’OMBRE.

Vous ne l’a verrez jamais

Personne ne l’a connaît

Depuis la nuit des temps elle écoute

Une voix qui guide sa route.

Entre cette fille et la voix, un micro

Qu’elle soit chez elle ou dans le métro.

Elle attend son “Bonjour”,

Elle enregistre sa voix

Elle écoutera son “au revoir”.

Demain, c’est encore l’espoir.

Il lui a dit “Je t’aime”

Grâce à Claude François.

Il sait que son nom commence par un “M”,

Elle lui a écrit plusieurs fois.

Elle vit à travers ses chansons

De l’amour à la déraison

Elle rêve... Ne l’a dérangez pas!

Ne l’a dérangez pas ...elle n’est pas là !

                                                                   


MAUD.