LE
MAL AIME
Un
après-midi d’août,
c’est la
pauvre grand-mère
qui décida
de faire le
voyage jusque
chez sa
fille pour
lui annoncer
que Yves, son fils,
était en
âge d’aller à l’école
maternelle.
Il
est vrai
que Pauline
n’avait pas
vu le
temps passer.
Trop occupée
avec l’arrivée de Catherine, petite
sœur des trois
garçons !
Quand
elle eut écouté
sa mère,
Pauline lui
répondit :
“Fais
les formalités
d’inscription
à la
campagne, ici, tu
vois bien
que je
n’ai pas
le temps!
“
Dans
un soupir,
elle ajouta :
“
J’espère que
maintenant qu’il
a sa
fille, René va
me laisser
tranquille; je n’avais
pas besoin de “ça”
pour me compliquer
encore la
vie ! “
Pendant
tout ce
temps, Yves était
resté près
de sa
grand-mère épiant
du regard
un geste
tendre de
sa maman.
Quand elle
réalisa qu’il
avait tout
entendu, elle
le prit
par un
bras et
lui montra
la porte
qui ouvrait
sur le
jardin. Dès que
le petit
fut arrivé
aux milieu
des massifs
de fleurs,
il fut
attiré par
une branche
de rosier et
son réflexe
fut de
l’attraper à
pleines mains.
Aussitôt, les épines
entrèrent dans
la chair tendre.
L’enfant regarda
tristement
le sang
couler sur
ses doigts
. Il prit
son mouchoir
et le
mit sur
ses blessures,
il ne se
plaindrait pas
car il
se ferait
gronder. Sa
petite main, même guérie, garda des
cicatrices qui
lui rappelaient
sa visite
chez ses
parents.
Avec
ses premiers
pas à
l’école, Yves connut
d’autres mésaventures
causées par
la méchanceté
des enfants.
PEY...RARD ça fait
un jeu
de mots
phonétiquement
rigolo...mais pas
pour lui
! Souvent
au moment
de partir,
une larme
coulait sur
sa joue
: il se demandait, anxieux, ce qui ferait rire ce jour-là
ses camarades à son sujet. Il
imaginait la
chose qui
pourrait l’empêcher
de rejoindre
son enfer.
Un
matin, sur le chemin de
l’école, une voiture monta sur
le trottoir
et faucha
l’enfant. On
transporta Yves à
l’hôpital, pour soigner d’abord
les parties
visibles des plaies.
Docile, il se laissait panser. De
temps en temps une infirmière lui caressait le
visage, mais chaque
jour une
lésion était décelée, ce qui
entravait le rétablissement
du petit
blessé. Le petit lit d’hôpital était
devenu son seul univers. La présence de sa grand-mère
était son
seul soutien. Son corps
grandissait. Des greffes
furent nécessaires, à intervalles réguliers.
Le
15 novembre
1970, le gâteau
que les
infirmières apportèrent à
leur petit
malade lui
procura une grande joie. En
fin d’année,
Pauline vint annoncer à son fils, en
guise de cadeau :
“
Je viens
te dire
qu’à partir
d’aujourd’hui
tu t’appelles
: Yves RONGIER “. Elle
regarda sa mère
et ajouta :
“
Depuis la
naissance de Claude, René a voulu
que ses
gosses portent son
nom.
Moi,
je suis bien contente d’avoir
pu y échapper!
Si tu
voyais comme
il est
heureux au
milieu de
ses bouteilles
de vin et de
ses boules de pétanque. Depuis
que nous sommes gérants à l’ Amicale, je n’ai
plus un moment à
moi ! Ce n’est
pas demain que je te reprends: celui - là “.
“Celui-là”, ce
fils qu’elle n’avait jamais tenu
dans ses bras. Se retournant vers en lui lançant
un regard froid,
elle lui dit :
“
Oui , tu as
encore un
frère, je ne
sais pas quand tu le
verras, si ,au moins on savait quand
tu quitteras
ce lit !”
Pour toute
réponse, on vit
des larmes couler sur les joues du
petit. Toute la
nuit, Yves répéta
dans sa tête: RONGIER, RONGIER.
Le
lendemain, il
eut la
visite de l’aumônier, il
se confia
à lui,
ayant perdu
peu à
peu tous
ses repères.
Dans ses moments
de solitude, il se
sentait lui aussi le désir de réconforter les
âmes en détresse. Dans sa tête, il se voyait
dans une mission entrain d’apaiser des petits
affamés.
Pour
le moment, c’était sa boite à musique qui le consolait
de tout. Avec elle, quand il parlait dans le bois qui lui
servait de micro, il
s’imaginait qu’il avait un compagnon qui l’écoutait.
Il
lui faisait plaisir en fredonnait des chansons qu’il
avait entendu par sa grand-mère.
Yves
traversa toutes les années
qui conduisent un enfant vers l’adolescence sans amour
maternel. Seule la grand-mère était
là ... Mais lasse de
tout avoir
à supporter.
Rares
étaient les copains qui
voulaient accueillir
un handicapé dans
leur groupe. Il se cantonnait dans sa solitude avec
pour seule compagne une feuille de papier où il
griffonnait ses états d’âme.
LE
MAL-AIME.
Je
veux crier ma dérision,
L’usage
veut que je donne mes affirmations.
Je
lutte pour un paradis
Et
je ne sais pas ce qu’il me dit.
Il
y des moments où il faut se retenir
A
une certaine mélancolie pour revenir.
Les
amis sont pleins de mensonges,
Pourtant
il doit bien exister de vrais songes.
L’orage
est dans mes yeux, Le tonnerre dans les cieux
et
les éclairs font les charmeurs.
Tout
ça, c’est vraiment que des pleurs!
La
mélancolie, c’est une amie,
Que
j’aime pour la vie.
Elle
passe par des chemins
qui
ont des lendemains.
L’amitié,
c’est pourtant de la tendresse
Mais
en ce moment, je n’ai pas de caresses!
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