UNE
PETITE LARME M’A TRAHIE.
C’est par
une trop belle
journée
qu’il fallut
accompagner et
soutenir la famille d’Yves et en particulier sa tante et
son oncle. Ils disaient adieu à leur cher Claude. Les
mots ne suffisent pas pour exprimer la douleur qu’on éprouve
à assister, impuissant, à cette scène : une mère et un
père se tenant debout devant le cercueil d’un fils. C’était
une triste leçon pour moi qui redoutait de me séparer de
Fabien, notre futur marié. Tout le temps de la cérémonie,
mon ami resta à mes côtés et ses yeux semblaient me
dire:
“J’ai
eu ma part d’occasions de quitter cette vie, mais tu
vois, je suis
encore là, près de toi.”
Au
premier rang, à côté de son petit-fils, pour la dernière
fois, se
tenait la pauvre grand-mère qui avait tenu à être présente.
Elle n’eut pas la force de rester jusqu’au bout, on
l’emporta sur
une chaise et, à la sortie de l’église chacun put
aller la réconforter. Sa fille Pauline était présente,
mais elle n’avait
pas l’air d’être trop affectée. J’entends
encore sa voix, dans
mes oreilles:
“La
mort n’est pas une chose que l’on commande :
aujourd’hui, c’est ici, demain ce sera peut-être chez
vous ou chez moi !”
Je
ne pris pas la peine de lui répondre; après l’avoir
saluée, je partis rejoindre
mon mari et mon ami. Même Yves n’éprouva pas le besoin
de rester avec elle. Au contraire, il
me dit qu’il allait
profiter de ses mini-vacances pour
m’aider aux préparatifs du mariage. Pour rien au
monde, il n’aurait
raté cette opportunité. Son savoir-faire me fut
utile pour la mise
en page des textes de la cérémonie que nous avions préparé
avec les futurs mariés. Fabien était content de voir
que son frère adoptif était là, en cette période
aussi importante pour lui.
Il
est vrai que ce jour du 23 juin arriva trop vite. Nous
n’avions prévu qu’un petit nombre d’invités et spécialement
la famille, mais Fabien avait parlé longuement de son frère
adoptif à sa future femme. Elle accepta qu’il se
joigne à nous tous. Toute la cérémonie fut immortalisée
par la camera de Rémy. Ludovic était chargé du bon
fonctionnement de l’appareil photos. Tous les invités
devaient être présents dans la boîte. A quatre heures
du matin, chacun repartit, satisfait d’avoir partager le
bonheur de mon fils et de sa jeune épouse. Pour moi, il
fallait bien que je me rende à l’évidence : une page
de ma vie se tournait. La seule note optimiste était
qu’enfin, une fille entrait dans la famille, avec la
venue de Véronique.
Avant
son départ, Yves me fit une confidence: il avait trouvé
dans ses relations, une charmante jeune fille qui comblait
ses moments de solitude. Il précisa :
“Nous
nous voyons pendant les heures de bureau. Je lui ai
parlé de toi. Mais rassures-toi, je ne lui ai rien
dévoilé de notre complicité amicale. Personne ne doit
être au courant de ce mystère qui s’appelle
“Nous”.
Je
vis s’en aller, une fois de plus, cet ami auquel je
souhaitais tous les bonheurs du monde! Cette fois, il était
bien dans sa peau. L’air de la Capitale lui réussissait.
Son départ coïncida avec le notre.
Les
vacances me firent oublier, un peu, l’agitation de ce
mois de juin.
C’est avec joie que je retrouvai nos amis, au bord de
l’Océan.
L’été
passa, ponctué par le courrier reçu de Paris. La présence
de mon mari et son soutien me suffisaient pour combler ce
vide dû à
l’absence de mes “trois” fils :
Le
premier m’avait été pris par son mariage, le second
par l’armée et le troisième par sa vie
professionnelle. Il y avait
de quoi verser une larme, de temps en temps! Et je
suis à peu près sûre que, pour eux, il en allait de même,
mais quand on est
un homme, on n‘avoue pas ces émotions-là.
Yves
eut l’occasion de verser cette larme. Il dut
revenir à Saint-Germain pour un dernier
remerciement, pour un ultime adieu à sa
grand-mère. Elle avait fermé les yeux sans le
revoir, elle qui l’avait tant aimé.
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