Par le petit garçon qui meurt près de sa mère

Tandis que des enfants s'amusent au parterre

Et par l'oiseau blessé qui ne sait pas comment

Son aile tout à coup s'ensanglante et descend

Par la soif et la faim et le délire ardent
Je vous salue, Marie.
Par les gosses battus, par l'ivrogne qui rentre

Par l'âne qui reçoit des coups de pied au ventre

Et par l'humiliation de l'innocent châtié

Par la vierge vendue qu'on a déshabillée

Par le fils dont la mère a été insultée
Je vous salue, Marie.
Par la vieille qui, trébuchant sous trop de poids

S'écrie: " Mon Dieu ! " par le malheureux dont les bras

Ne purent s'appuyer sur une amour humaine
Comme la Croix du Fils sur Simon de Cyrène
Par le cheval tombé sous le chariot qu'il traîne
Je vous salue, Marie.
Par les quatre horizons qui crucifient le monde
Par tous ceux dont la chair se déchire ou succombe
Par ceux qui sont sans pieds, par ceux qui sont sans mains

Par le malade que l'on opère et qui geint

Et par le juste mis au rang des assassins
Je vous salue, Marie.
Par la mère apprenant que son fils est guéri

Par l'oiseau rappelant l'oiseau tombé du nid
Par l'herbe qui a soif et recueille l'ondée

Par la nature qui reçoit de l’eau tombée du ciel
Par le baiser perdu par l'amour redonné

Et par le mendiant retrouvant sa monnaie

Je vous salue, Marie.

Georges Brassens

Par l’innocent qui tombe sous les balles ennemies
Tandis que des inconscients continuent à faire la guerre
Et par le chien apeuré sous les coups d’un maitre abruti
Et qui ne comprend pas pourquoi il saigne, pechère.
Je vous salue, Marie.
Par les femmes et les enfants battus
Par l’homme imbibé d’alcool
Et par l’injustice infligée au non-coupable, abattu
Par la vierge à qui on a rendu, sans protocole,

Son fils  à la descente de la croix, sans vie.

Par la voisine qui se retrouve sans un morceau de pain
Et qui n’aura pas de quoi assouvir sa faim.
Je vous salue, Marie.
Par ceux qui ne verront jamais un coucher de soleil
Par ceux qui ne marcheront jamais sur le sable à la couleur du miel.
Je vous salue, Marie.
Par cette maman qui va pouvoir tenir son fils dans ses bras
Par la nature qui reçoit de l’eau tombée d’ici-bas
Par la caresse oubliée

Par l’amour retrouvé
Et par la vieille dame revoyant

Son enfant vivant :

 Je vous salue, Marie.

Maud